Think Forward.

Maroc-Nigeria : De la froideur à un partenariat stratégique continental... 1658

Je me trouve à Abeokuta au Nigéria pour l’organisation des Championnats d’Afrique d’Athlétisme des U18 et des U20. Quoi de plus normal que de penser aux relations entre le Maroc et le Nigeria qui ont connu une évolution notable passant d’une période de distance et de prudence à un partenariat stratégique majeur pour l’Afrique. Un indice éloquent: la compagnie aérienne nationale assure aujourd’hui deux vols quotidiens sur Lagos. Dans les années 1960 à 1980, les relations entre le Maroc et le Nigeria sont restées formelles mais distantes, en raison de divergences idéologiques profondes. Le Nigeria, poids lourd anglophone et proche du bloc non-aligné ; un non alignement qui signifiait plutôt un alignement sur les modèles de l'Europe de l’Est de l'époque. Le Maroc, quant à lui, plus proche de l’Occident, adoptait une diplomatie prudente en respect de son positionnement séculaire et de ses fondamentaux de non ingérence et de respect des peuples et de leurs choix. La distanciation entre les deux pays a été plus actée notamment après le retrait du Royaume de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) en 1984, en réaction à l’adhésion de la République fantoche arabe sahraouie démocratique à cette organisation. La question du Sahara dit occidental constituait un point de friction majeur, le Nigeria soutenant la RASD, ce qui freinait tout rapprochement significatif. Ainsi, les relations durant la décennie 1980–1990 sont restées tièdes, limitées à des échanges diplomatiques de base. Le retour de la démocratie au Nigeria en 1999, avec l’élection d’Olusegun Obasanjo, et la montée en puissance du Maroc sur la scène africaine ont marqué un tournant. Les deux pays ont entamé un rapprochement diplomatique discret mais concret. Plusieurs domaines ont été explorés pour renforcer la coopération : l’énergie avec des discussions sur une coopération gazière, le commerce avec des échanges modestes mais en croissance, l'agriculture dans l'objectif de satisfaire aux besoins croissants de la population nigériane, ainsi que la dimension religieuse, notamment à travers le soufisme et l’enseignement religieux modéré promu par le Maroc. Le véritable tournant s’est produit en décembre 2016, lors de la visite historique du roi Mohammed VI à Abuja. Cette visite a marqué une rupture dans les relations bilatérales, avec la signature de nombreux accords de coopération dans les secteurs agricole, bancaire, industriel, religieux et énergétique. L'on rappellera ici les accolades fraternelles et les propos chaleureux ayant marqués les rencontres de Sa Majesté le Roi Mohammed VI avec le Président Buhari. Le projet phare dans cette dynamique est le gazoduc Nigeria-Maroc (NMGP), annoncé en 2016. Ce projet ambitieux, long de plus de 5600 km et traversant 13 pays d’Afrique de l’Ouest, vise à acheminer le gaz nigérian jusqu’au Maroc, puis potentiellement vers l’Europe. Ses objectifs sont multiples : assurer la sécurité énergétique, favoriser l’intégration régionale et renforcer la stabilité géopolitique. Entre 2022 et 2023, plusieurs accords de financement et d’études techniques ont été signés avec la CEDEAO, l’OPEP et des partenaires européens. Parallèlement, la coopération s’est diversifiée : des banques marocaines ont investi au Nigeria, tandis que le partenariat entre l’Office chérifien des phosphates (OCP) et le Dangote Group a renforcé la production d’engrais au Nigeria. Sur le plan religieux, le Maroc accueille des imams nigérians dans ses centres de formation, consolidant ainsi les liens culturels et religieux. Depuis l’élection du président Bola Tinubu en 2023, la coopération active avec le Maroc semble se poursuivre. Le projet du gazoduc NMGP avance avec le soutien d’acteurs importants tels que l’Union européenne et la Banque Islamique de Développement, malgré un contexte mondial compliqué marqué par la guerre en Ukraine et des instabilités régionales. La question du Sahara occidental demeure une ligne de fracture modérée : le Nigeria n’a pas retiré sa reconnaissance de la RASD, mais n’émet plus de déclarations hostiles envers Rabat depuis plusieurs années, témoignant d’un apaisement diplomatique certain. Le partenariat Maroc-Nigeria s’inscrit dans une dynamique géostratégique complexe, notamment en compétition et complémentarité avec l’Algérie. Le projet Maroc-Nigeria est parfois perçu comme un contrepoids au gazoduc transsaharien Algérie-Nigeria, qui reste à l’état de projet contrairement au projet marocain qui avance à grande vitesse et selon le timing arrêté. Sur le plan régional, cette alliance pourrait redessiner les axes Nord-Sud de coopération africaine, reliant l’Afrique de l’Ouest au Maghreb, et dépasser ainsi la traditionnelle division francophone/anglophone. L’adhésion du Maroc à la CEDEAO, bien que suspendue, illustre cette volonté d’intégration économique poussée avec Abuja comme partenaire-clé. Les relations entre le Maroc et le Nigeria ont évolué d’une froideur diplomatique à une alliance stratégique structurante pour le continent africain. Le projet de gazoduc, l’implantation bancaire, la coopération agricole et religieuse, ainsi que les convergences géoéconomiques font de ce partenariat un pilier majeur du Sud global africain. La prochaine décennie sera déterminante pour mesurer la capacité de ces deux pays à transformer leur coopération en un moteur d’intégration continentale. Le panorama clair et la chronologique de l’évolution des relations bilatérales Maroc-Nigeria, souligne les enjeux politiques, économiques et géostratégiques qui les sous-tendent. Peut on conclure sans rendre un hommage appuyé et prier pour l’âme du Président Muhammadu Buhari décédé le dimanche 13 juillet à Londres à l'âge de 82 ans des suites d'une longue maladie. C’est durant sa présidence que les relations entre les deux pays se sont développées et sont sorties de la routine conflictuelle larvée vers une coopération Win Win. Paix à son âme.
Aziz Daouda Aziz Daouda

Aziz Daouda

Directeur Technique et du Développement de la Confédération Africaine d'Athlétisme. Passionné du Maroc, passionné d'Afrique. Concerné par ce qui se passe, formulant mon point de vue quand j'en ai un. Humaniste, j'essaye de l'être, humain je veux l'être. Mon histoire est intimement liée à l'athlétisme marocain et mondial. J'ai eu le privilège de participer à la gloire de mon pays .


8000

33.0

FIFA World Cup 2026: risk of a tournament reserved for the wealthiest? An unprecedented inflation... 219

The 2026 World Cup, jointly organized by the **États-Unis, le Canada et le Mexique**, promises to be an extraordinary event: an expanded format with 48 teams, 104 matches, state-of-the-art facilities, and what is expected to be the most massive media coverage in sports history. However, as initial details about ticketing and logistical costs emerge, growing concern is palpable among fans: **the North American World Cup could become the most expensive World Cup ever organized**, to the point of calling into question the very accessibility of the event. At the heart of this concern is the American model of *dynamic pricing*, a system where prices are never fixed. They fluctuate according to demand, the volume of online requests, the status of the match, and even algorithmic parameters beyond the consumer’s control. For example, a hotel room normally priced around 200 USD might not be offered for less than 500 or even 600 USD, probably more for late bookers. This mechanism, common in American professional sports, could turn World Cup ticket purchases into a frenzied and even unfair race. Some final tickets are already priced between $5,000 and $20,000, a completely unprecedented level. Group stage tickets could see daily price swings, making financial planning nearly impossible for foreign fans. American supporters, already used to high prices in the NBA, NFL, or MLB, seem better equipped to navigate this system. Conversely, for Moroccan, Brazilian, Senegalese, Egyptian, or Indonesian fans, this model represents an almost insurmountable barrier. Adding to this cloudy scenario is the question of the official resale platform: **FIFA Official Ticket Resale Platform**. Ideally, it prevents black-market sales and secures transactions. But in a market dominated by speculative logic, it could become a playground for actors seeking to maximize profits, especially since FIFA takes a commission. FIFA has not yet communicated safeguards it plans to implement. Without strict regulation, resale could amplify price volatility, particularly for highly sought-after matches: final rounds, games involving teams with strong diasporas, as well as the opening match and final. One of the most puzzling aspects of this World Cup is the early sale of tickets without specific match assignments. In the USA, out of the **6 millions de billets prévus**, nearly **2 millions ont déjà trouvé preneur**, while buyers do not yet know which matches they paid for. This reflects several dynamics: - Total confidence from the American public in the event's organization; - The high purchasing power of an audience willing to invest heavily in sports experiences; - A structural asymmetry between American supporters and international fans, the latter compelled to wait for match assignments to plan trips and budgets. This situation fuels fears that stadiums will be largely filled with local spectators, to the detriment of fans supporting their teams from abroad. The USA ranks among the world’s most expensive hotel markets, and the selected cities are no exception: **New York, Los Angeles, Miami, Seattle, Dallas ou encore San Francisco** regularly top lists of the priciest destinations. A genuine inflation is expected across the hotel sector. During major sporting events, room prices can double or triple. For a month-long World Cup, projections are even more alarming: some operators are already talking about "prices never seen before." Fans should expect: - Massive hikes in hotel prices; - Predictable saturation of alternative accommodations; - Very high internal transport costs, since distances between host cities often require air travel. All these factors raise a central question: who will the 2026 World Cup really serve? The 250 million registered football players worldwide may feel somewhat frustrated. Their sport is slipping away. The North American model, dominated by commercial logic and speculative mechanisms, seems incompatible with football’s tradition as a popular sport. We might witness the emergence of a two-speed World Cup: - A premium World Cup, largely attended by North American audiences and wealthier supporters; - A remote World Cup for millions of international fans who must content themselves with televised broadcasts due to insufficient means to attend. For supporters from countries where median income is far lower than in the United States, be they African, Latin American, Asian, or even European nations, the experience could become inaccessible. FIFA clearly faces a strategic dilemma. Sooner or later, it will have to address this issue. Certainly, the choice of the United States guarantees top-level infrastructure, record revenues, a colossal advertising market, and a logistics organization of rare reliability. But this financial logic could directly contradict football’s social and symbolic mission: to bring people together, unite, and include. If the 2026 World Cup turns into an elitist event, it risks leaving a lasting negative impression in public opinion. Modern football, already criticized for its commercial drift, could face increased pushback from fans—the very fans who keep the sport alive—especially as FIFA’s revenues rise from $7.5 billion to $13 billion. The World Cup is thus under tension. In 2026, it will likely be spectacular both sportingly and organizationally. But it could also mark a turning point in World Cup history: when the event stops being a popular and accessible gathering and turns into a premium product for a privileged audience. Between ticket inflation, skyrocketing hotel prices, logistical distances, and the American economic model, the real risk exists that this edition will go down as the most exclusive, most expensive, and least accessible. FIFA, the organizers, and host cities will have to find ways to mitigate this dynamic to preserve football’s very essence: a universal sport that belongs to everyone. Could the proximity between Gianni Infantino and Donald Trump, even their friendship, help in any way?