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Dopage, un problème de santé publique... 3245

Je viens de passer une journée mémorable à Khouribga, le 30 décembre de l’année écoulée à l’invitation de l’Agence Marocaine Antidopage que préside la vaillante Fatima Abouali. C’était à l’occasion de l’une des étapes de la Caravane Nationale « Sport sans dopage », visant la sensibilisation des jeunes quant aux dangers des substances dopantes sur la santé; caravane placée sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi , que Dieu l'assiste. A chacune de ces invitations, car ce n'est pas la première puisque j'avais participé à l'étape de Laayoune et d'Errachidia, l'occasion m'est donnée pour m'adresser aux autorités et personnalités présentes mais surtout aux dirigeants sportifs et aux jeunes. AMAD est l’autorité marocaine compétente en matière de lutte contre le dopage. Elle est assez récente puisque n’a été créée que suite aux directives royales contenues dans la lettre historique aux assises du sport en 2008. Elle compte aujourd'hui 3 ans d'âge. Cela ne veut point dire que les sportifs marocains n’étaient pas contrôlés avant la création de l’AMAD. C’était alors les fédérations internationales, puis une agence régionale qui contrôlait les sportifs dans toute la région d’Afrique du Nord. Sa Majesté disait en substance en 2008, dans cette lettre : « …Cela vaut également pour le dopage, qui constitue un phénomène étranger à nos traditions et à notre culture et qui est répréhensible par la loi et l'éthique sportive. C'est pourquoi Nous engageons les autorités compétentes à sévir vigoureusement contre cette pratique et à faire preuve d'intransigeance dans la répression de l'utilisation et de la commercialisation des substances dopantes, et ce, conformément à la législation nationale et à nos engagements internationaux en la matière. » C’est à cela que travaille sans répit l’AMAD. Outre de veiller sur les sportifs de haut niveau soumis de par la règlementation internationale à des protocoles strictes de contrôles réguliers, en compétition et surtout et beaucoup en dehors des compétitions, L’agence s’attaque aussi à un phénomène dont nous tardons probablement à prendre conscience, celui du recours par les amateurs adeptes de la culture du corps à des produits apparemment innocents et inoffensifs mais qui peuvent constituer un danger véritable pour la santé notamment des jeunes, souvent inconscients, insoucieux ou mal informés et formés. Le recours à des produits tels que certains compléments alimentaires, d’origine des fois douteuses, constitue un danger de santé publique et c’est pour en informer les populations que l’AMAD a initié la caravane qui sillonne le territoire national pour justement mettre beaucoup d’informations à la portée des jeunes. Prendre des produits d’une certaine nature peut s’avérer extrêmement dangereux avec des répercussions des fois irréversibles pouvant aller à des myopathies graves, des troubles de pression artérielle, des troubles graves de la sexualité et tant d’autres problèmes de santé. C’est dire qu’il ne s’agit pas d’effets secondaires auxquels on pourrait s’accommoder. Le professeur Moulay Ahmed Belimam, secrétaire général de l’AMAD, n’arrête pas de le répéter et d’alerter sur ces dangers d’un autre genre, des dangers des temps modernes. Certains compléments alimentaires comptent dans leurs compositions des stéroïdes anabolisants et autres molécules non autorisées et non admises dans la pratique sportive pour leur nocivité et parce que détournée de leur usage thérapeutique normal. Il s’agit en fait de contourner l’inefficacité des produits de fabrication de base de ses compléments alimentaires en y ajoutant des molécules et composants dont les effets sont connus, par exemple sur le volume musculaire notamment par leurs effets la rétention d’eau. Le volume musculaire, outre la question de l’apparence laisse donner une impression de force, hélas oh combien illusoire. les personnes prenant ces produits, apparemment forts, ne sont même pas aussi forts que la moyenne des personnes non entrainées. Les recherches ont aussi montré le caractère addictif de ces produits ; le consommateur se retrouve ainsi pris dans un engrenage qu’il ne va plus maitriser. Qu'une discipline sportive isolée soit contaminée par le phénomène de dopage, on peut toujours objecter qu'il s'agit d'un fléau que l’on peut possiblement circonscrire. On peut alors prendre des mesures appropriées et corriger l'anomalie. La gravité découle ici du fait que de nombreuses disciplines sportives et pratiques physiques pour ne pas dire toutes sont contaminées. Des jeunes dont l’objet de la pratique n’est pas la compétition ou encore des jeunes qui pratiquent sans la moindre volonté de faire partie du mouvement sportif national sont aujourd’hui victimes insoucieuses de pratiques nocives pour leur santé et illicites vis à vis de la loi. Cela devient préoccupant. Il y a là un problème de santé publique et de mise en œuvre de la loi. S’imposent ainsi des mesures de contrôle des produits suspects, de leur traçabilité et de la nature de leurs composants tout aussi bien que s’impose de débusquer les circuits d’approvisionnement et de la commercialisation frauduleuses. Et il y a urgence. Reste aussi à persévérer dans la voie de la lutte contre les pratiques de dopage car c'est aussi de la triche ; c’est interdit et encadré par les règlements sportifs mais également par la loi. Les consommateurs/utilisateurs de produits et pratiques interdites doivent en être dissuadés. Ceux qui en font la promotion, ceux qui en font commerce, sportifs, dirigeants doivent savoir que c'est à la fois dangereux et illicite. Tous doivent comprendre que c’est une triche inadmissible et qu’il y a au Maroc une loi qui prévoit des punitions sévères pour cette triche-là spécifiquement. Celui ou celle qui se dope, finit toujours par se faire attraper car toute substance introduite dans le corps est détectable. Tous ce que vous mettez dans votre corps à peine consommé laisse des traces ; des traces détectables en laboratoire. La loi aujourd’hui ne punit plus que le sportif en cas de dopage mais également toute personne en relation avec le cas confondu. En 2022, l’AMAD a effectué un total de 919 tests, dont 704 effectués par l’AMAD en qualité d’autorité de contrôle et 215 prélèvements, comme autorité de prélèvement réalisés pour le compte et à la demande d’autres organismes.
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Aziz Daouda Aziz Daouda

Aziz Daouda

Directeur Technique et du Développement de la Confédération Africaine d'Athlétisme. Passionné du Maroc, passionné d'Afrique. Concerné par ce qui se passe, formulant mon point de vue quand j'en ai un. Humaniste, j'essaye de l'être, humain je veux l'être. Mon histoire est intimement liée à l'athlétisme marocain et mondial. J'ai eu le privilège de participer à la gloire de mon pays .


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Classement du Maroc au GTCI 2025 : une alerte et une occasion de réveiller le potentiel... 61

Le GTCI, ou Global Talent Competitiveness Index, est un indice international qui mesure chaque année la capacité des pays à attirer, développer et retenir les talents. C’est aujourd’hui l’un des baromètres les plus utilisés pour évaluer la compétitivité des nations dans l’économie du savoir. L'indice repose sur 77 indicateurs, couvre 135 pays à aujourd'hui et vise à mesurer la capacité à attirer, développer et retenir les talents à travers un modèle « input–output » articulé autour de six grands piliers, incluant notamment les compétences techniques et générales. En 2025, le Maroc apparaît à la 98ᵉ place sur les 135 pays. Il ferme le top 10 africain, derrière Maurice, les Seychelles, l’Afrique du Sud, le Cap-Vert, le Botswana, la Tunisie, la Namibie, l’Égypte et l’Algérie. Surprenant. Il se situe clairement dans le groupe des pays à potentiel mais encore en décrochage en termes d’écosystème global des talents. Les progrès sont réels mais pas suffisants. Des fragilités structurelles persistent. Le gouvernement est ici expressément interpellé car directement responsable. L'amélioration du score est une affaire de politique publique. Pris isolément, le rang 98 constitue une photographie utile, qui agrège des progrès ponctuels et des défaillances structurelles. Le fait que de petits États insulaires comme Maurice et les Seychelles devancent largement le Maroc montre que quelques variables décisives: gouvernance, stabilité réglementaire, capacité à attirer des talents étrangers, qualité de l’offre éducative, suffisent à créer un différentiel de compétitivité significatif dans un même continent. La progression du Maroc dans d’autres indices comme l’Innovation confirme une dynamique positive, mais elle coexiste avec des faiblesses endémiques en *R&D, financement des start-up et densité de chercheurs*, qui viennent limiter la conversion de ces progrès en gains de compétences à forte valeur ajoutée. Le talon d’Achille le plus souvent souligné par les analyses du GTCI concerne la formation professionnelle et technique, où le Maroc affiche des performances particulièrement, voire étonnement faibles. Concrètement, il s'agit d'inadéquation entre les compétences disponibles et les besoins des secteurs en croissance: industrie avancée, numérique, IA, services à forte intensité de savoir, fuite accélérée des profils qualifiés vers des marchés plus attractifs, coût économique direct lié à une main-d’œuvre insuffisamment opérationnelle. Tant que la formation professionnelle et technique ne sera pas pensée comme un pilier stratégique, avec des référentiels co-construits avec les entreprises, des dispositifs d’apprentissage robustes et une évaluation systématique de l’insertion, le Maroc restera en retrait dans les piliers «Vocational and Technical Skills » du GTCI. Il faut noter par exemple que cela marche très bien en ce qui concerne l'industrie de l'aéronautique et de l'automobile où le Maroc a su bien faire. L’attractivité et la rétention des talents renvoient, elles, à une problématique à la fois économique, réglementaire et sociétale. Le classement met en évidence une performance médiocre sur la capacité à attirer des talents étrangers et à retenir les profils marocains hautement qualifiés, ce qui renvoie à la combinaison d’éléments comme la qualité de vie, la mobilité: visas et résidence, la fiscalité, la liberté académique ou encore la profondeur de l’écosystème d’innovation. Si le Maroc a multiplié les signaux favorables avec des zones industrielles et technologiques, une politiques d’attractivité de l’investissement, une montée en gamme de certains secteurs, l’absence d’un «pack» cohérent pour les talents internationaux et d’un environnement pleinement compétitif pour les chercheurs, ingénieurs ou entrepreneurs limite l’impact de ces initiatives. Les discours officiels tendent parfois à insister sur les progrès réalisés dans les classements internationaux, sans toujours intégrer la dimension de rendement réel des politiques publiques. Mettre en avant des réformes, plans sectoriels ou stratégies ne suffit pas si leur traduction en compétences opérationnelles, en emplois qualifiés et en projets innovants mesurables, reste limitée; ce que rappelle implicitement le rang 98. De même, une politique de l’offre fondée sur la multiplication des filières de formation, sans alignement fin et rapide avec les besoins de l’économie, accentue le décalage entre diplômes et emplois, phénomène que captent aussi bien le GTCI que d’autres indicateurs de capital humain. Les cités des métiers et des compétences ont été pensées pour cet impératif mais sont elles alignées correctement avec l'objectif. Face à ce diagnostic, plusieurs orientations apparaissent prioritaires. La première consiste à transformer en profondeur la formation professionnelle selon une logique de « filières-marché » : co-financement de programmes d’apprentissage en entreprise, certifications modulaires co-signées par les branches professionnelles, suivi systématique d'un ajustement en temps réel des contenus. La deuxième est la mise en place de tableaux de bord nationaux des compétences, publiés régulièrement, rassemblant données sur l’insertion, qualité des emplois, mobilité internationale et évolution des besoins, afin de rendre visibles les impacts des réformes et de renforcer la redevabilité publique. Vient ensuite la question d’un véritable «pack d’attractivité» pour les profils hautement qualifiés, nationaux et étrangers. Celui-ci pourrait articuler procédures de visas simplifiées et rapides, incitations fiscales ciblées et limitées dans le temps, facilités d’installation: scolarité internationale, logement, accompagnement familial, le tout conditionné à des engagements concrets d’emploi, de transfert de compétences ou d’investissement. Enfin, la création d’un accélérateur «entreprises–universités», associant fonds compétitifs pour projets conjoints, stages obligatoires et chaires sur les compétences émergentes: IA, cybersécurité, biotech, permettrait de rapprocher durablement le système éducatif du tissu productif, sans oublier l'intéressement des encadrants et chercheurs dans le capital des compagnies crées. Il faut aussi en permanence auditer l’efficacité des dispositifs de formation et d’insertion. La démarche limiterait le biais d’autosatisfaction et alignerait davantage le storytelling national sur la réalité des résultats. Ce ci renforcerait fortement la crédibilité du pays auprès des investisseurs et partenaires. Le signal envoyé par le classement du Maroc au GTCI 2025 est donc d’abord une alerte stratégique. Sans refonte ambitieuse de la formation professionnelle, sans politique structurée d’attractivité et sans pilotage par les résultats, le Maroc risque de rester durablement dans la seconde moitié du classement. Avec des ajustements intelligemment adaptés, ce rang pourrait, à court terme, devenir le point de départ d’une trajectoire ascendante en phase avec les ambitions affichées par le Royaume.