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L’étrange médiation d’Ahmed Attaf : entre déni diplomatique et manœuvre politique... 58


L’étrange médiation d’Ahmed Attaf : entre déni diplomatique et manœuvre politique...

La dernière déclaration d’Ahmed Attaf, vaillant ministre algérien des Affaires étrangères, a surpris jusqu’aux plus fins connaisseurs du dossier saharoui. En affirmant que l’Algérie serait «disposée à jouer l’intermédiaire entre le Maroc et le Polisario», Attaf semble s’aventurer dans une posture diplomatique qui confine à l’absurde, tant elle contredit la réalité, les textes internationaux et même les propres choix stratégiques d’Alger. Car, derrière le ton placide qu’affectionne le chef de la diplomatie algérienne, cette sortie révèle un mélange d’amnésie politique, de calcul interne et d’enfumage externe. Il a même omis d’expliquer pourquoi cette proposition revient maintenant. La première anomalie réside dans l’ignorance feinte de l'essentiel de la résolution 2797 du Conseil de sécurité. Celle ci précise explicitement que l’Algérie **est partie prenante du conflit**, et qu’à ce titre elle est appelée à **prendre part aux négociations**, sous la conduite de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, Staffan de Mistura, mais **aux États-Unis**. Autrement dit, l’Algérie ne peut en aucun cas se présenter comme un acteur extérieur, neutre ou impartial. Elle **est dans le dossier**, et n’en sortira pas par un simple effet de langage. Deuxième amnésie, plus criante encore : Attaf fait comme si **aucune main tendue** n’avait été adressée par le Maroc à l’Algérie. Or Sa Majesté le Roi Mohammed VI a, à maintes reprises, invité expressément le président Tebboune à un **dialogue franc, direct, sans conditions**, pour traiter l’ensemble des questions bilatérales, y compris les causes profondes des tensions. Il n’a jamais répondu. Pire, il a maintenu la fuite en avant diplomatique : rupture unilatérale des relations, fermeture de l’espace aérien, discours hostiles parfois dépassant l'entendement et soutien renforcé au Polisario. Dans ce contexte, la prétention d’Alger à vouloir « rapprocher » Rabat et le Polisario relève plus du théâtre diplomatique que d’un geste sincère. En présentant le conflit comme un simple malentendu entre « deux parties » que l’Algérie pourrait aider à dépasser, Attaf adopte un ton presque ingénu. Un ton naïf qui frôle le ridicule. Comme si le rôle central d’Alger dans la genèse, l’entretien et la militarisation du conflit n’était pas un fait établi, reconnu et documenté. Comment prétendre jouer le médiateur quand : * le Polisario est **hébergé à Tindouf**, sur le sol algérien, * ses dirigeants circulent avec des passeports diplomatiques algériens, * son *Président* est transporté par avion présidentiel algérien, * son armement provient en grande partie d’Alger, * sa diplomatie dépend du MAE algérien qui en dicte le contenu et la démarche. La prétention à la neutralité devient alors non seulement **anachronique**, mais **indécente** au regard de l’histoire du dossier. Cette proposition improbable pourrait, en réalité, révéler le désarroi d’Alger face à son **isolement régional et international croissant**. L’Algérie cherche peut-être à se repositionner en acteur de «paix» et de «concorde», dans un contexte où sa diplomatie est perçue comme rigide, agressive et prisonnière d’un narratif dépassé. Elle est directement accusé de favoriser le terrorisme dans la région du Sahel. Le Mali, au perchoir de l'ONU, a tenu un discours on ne peut plus direct, dans ce sens. Il s’agit aussi et en même temps, peut-être, d’une manière détournée de **réamorcer un contact** avec Rabat, sans assumer publiquement le revirement, alors que toutes les crises entre les deux pays, y compris la rupture actuelle, sont issues de décisions unilatérales algériennes. Le Royaume a toujours été l'ennemi idéal pour expliquer l'emprise de l'armée sur tous les rouages de l'état. Alger sait maintenant , finalement, que cette tension permanente lui coûtera très cher tôt ou tard, tant sur le plan stratégique qu’intérieur. La manœuvre vise sûrement à briser l’isolement et possiblement à renouer indirectement avec Rabat. Who knows? En tout cas, la déclaration est un enfumage pour masquer une cabriole spectaculaire sur la question de Sansal et de la Palestine. Sansal a quitté la prison et a été reçu à l'Elysée; puis de **peur**, voter la résolution sponsorisée par les USA qui prévoit le désarmement du Hamas est une pirouette, un reniement de la doctrine fondatrice du régime algérien. C'est alors qu'il faut convoquer la situation interne en Algérie. Le contexte domestique joue un rôle central dans les derniers revirements. La population fait face à : * des pénuries persistantes, * une situation socio-économique fragile, * la dégringolade de la valeur du dinar, * une incompréhension grandissante face aux contradictions du pouvoir. Le choc a été immense quand l’Algérie, qui se proclamait « plus palestinienne que les Palestiniens » et « plus Hamas que le Hamas », a voté **en faveur d’une résolution américaine** qui prévoit le **désarmement du Hamas** et l’installation d’une **force internationale à Gaza**. Le commun des mortels en Algérie n'est pas prêt de comprendre ce changement brutal de posture. Le vote a profondément dérouté une opinion algérienne habituée à un discours enflammé contre Washington l'impérialiste et Israël la sioniste. Le discours officiel a toujours été inconditionnellement pro-Hamas. Dans cette atmosphère tendue, la sortie d’Ahmed Attaf ressemble fort à un **contre-feu médiatique**, destiné à détourner l’attention du volte face algérien sur le dossier palestinien et sur Sansal. Finalement, la proposition d’Attaf n’est ni sérieuse, ni crédible, ni neutre. Elle révèle, en revanche : * une **crise de narration** au sein de la diplomatie algérienne, * un **isolement international** de plus en plus pesant, * une **réalité intérieure fragile** que le pouvoir tente de masquer par des artifices diplomatiques, * et une difficulté persistante à assumer la vérité du conflit : **l’Algérie est, depuis le premier jour, partie prenante**. L’ambiguïté n’est jamais loin dans les propos de M. Attaf. Ici encore, il affirme vouloir se porter médiateur, en respectant l’ensemble des résolutions du Conseil de sécurité relatives à la question. Bien évidemment, il ne manque pas de remettre sur la table la condition référendaire. Il est sans doute le seul à ignorer que cela n’est plus à l’ordre du jour de l’ONU depuis 2007. La proposition d’Attaf n’est acceptable ni sur la forme, ni sur le fond, et n’apporte rien de positif. Il faut savoir que la conférence de presse était montée et non réalisée en direct. Le langage corporel ne trompe pas : l’homme est sous le contrôle de la junte, et s’exprime donc comme la simple voix de l’armée, véritable pouvoir en Algérie. *Interpréter la résolution 2797 à la sauce algérienne et l'accepter tout en la rejetant est ridicule*. Plutôt que de jouer au médiateur imaginaire, Alger serait mieux inspirée de répondre à la main tendue du Maroc et d’assumer sa place à la table des négociations, conformément au droit international et à la réalité des faits.

L’étrange médiation d’Ahmed Attaf : entre déni diplomatique et manœuvre politique...

La dernière déclaration d’Ahmed Attaf, vaillant ministre algérien des Affaires étrangères, a surpris jusqu’aux plus fins connaisseurs du dossier saharien. En affirmant que l’Algérie serait « disposée à jouer l’intermédiaire entre le Maroc et le Polisario », Attaf semble s’aventurer dans une posture diplomatique qui confine à l’absurde, tant elle contredit la réalité, les textes internationaux… et même les propres choix stratégiques d’Alger. Car, derrière le ton placide qu’affectionne le chef de la diplomatie algérienne, cette sortie révèle un mélange d’amnésie politique, de calcul interne et d’enfumage externe. La première anomalie réside dans l’ignorance feinte de la résolution 2797 du Conseil de sécurité. Adoptée récemment, celle ci rappelle explicitement que l’Algérie **est partie prenante du conflit**, et qu’à ce titre elle est appelée à **prendre part aux négociations**, sous la conduite de l’Envoyé personnel du Secrétaire général, Staffan de Mistura, mais… **aux États-Unis**. Autrement dit, l’Algérie ne peut en aucun cas se présenter comme un acteur extérieur, neutre ou impartial. Elle **est dans le dossier**, et n’en sortira pas par un simple effet de langage. Deuxième amnésie, plus criante encore : Attaf fait comme si **aucune main tendue** n’avait été adressée par le Maroc à l’Algérie. Or Sa Majesté le Roi Mohammed VI a, à maintes reprises, invité expressément le président Tebboune à un **dialogue franc, direct, sans conditions**, pour traiter l’ensemble des questions bilatérales, y compris les causes profondes des tensions. L’Algérie n’a jamais répondu. Pire, elle a maintenu la fuite en avant diplomatique : rupture unilatérale des relations, fermeture de l’espace aérien, discours hostiles parfois dépassant l'entendement, pour ne pas dire plus, et soutien renforcé au Polisario. Dans ce contexte, la prétention d’Alger à vouloir « rapprocher » Rabat et le Polisario relève plus du théâtre diplomatique que d’un geste sincère. En présentant le conflit comme un simple malentendu entre « deux parties » que l’Algérie pourrait aider à dépasser, Ahmed Attaf adopte un ton presque ingénu. Un ton naïf qui frôle le ridicule. Comme si le rôle central d’Alger dans la genèse, l’entretien et la militarisation du conflit n’était pas un fait établi, reconnu et documenté. Comment prétendre jouer les médiateurs quand : * le Polisario est **hébergé à Tindouf**, sur le sol algérien, * ses dirigeants circulent avec des passeports diplomatiques algériens, * son *Président* est transporté par avion présidentiel algérien, * son armement provient en grande partie d’Alger, * sa diplomatie dépend du MAE algérien qui en dicte le contenu et la démarche. La prétention à la neutralité devient alors non seulement **anachronique**, mais **indécente** au regard de l’histoire du dossier. Cette proposition improbable pourrait, en réalité, révéler les inquiétudes d’Alger face à son **isolement régional et international croissant**. L’Algérie cherche peut-être à se repositionner en acteur de « paix » et de « concorde », dans un contexte où sa diplomatie est perçue comme rigide, agressive et prisonnière d’un narratif dépassé. Elle est directement accusé de favoriser le terrorisme dans la région du Sahel. Le Mali, au perchoir des nations unis, a tenu un discours on ne peut plus direct, dans ce sens. Il s’agit aussi et en même temps, peut-être, d’une manière détournée de **réamorcer un contact** avec Rabat, sans assumer publiquement un revirement, alors que toutes les crises entre les deux pays, y compris la rupture actuelle, sont issues de décisions unilatérales algériennes. Le Royaume a toujours été l'ennemi idéal pour expliquer l'emprise de l'armée sur tous les rouages de l'état. Alger sait maintenant , finalement, que cette tension permanente lui coûtera très cher tôt ou tard, tant sur le plan stratégique qu’intérieur. La manœuvre vise sûrement à briser l’isolement… ou possiblement à renouer indirectement avec Rabat. Who knows? En tout cas, la déclaration est un enfumage pour masquer un revirement spectaculaire sur la Palestine. Voter la résolution sponsorisée par les États-Unis est un revirement surprise. Voter un texte qui prévoit le désarmement du Hamas est un reniement de la doctrine fondatrice du régime algérien. C'est alors qu'il faut aussi faire lien avec la situation interne en Algérie. Le contexte interne algérien joue ici un rôle central dans les derniers revirements. La population fait face à : * des pénuries persistantes, * une situation socio-économique fragile, * la dégringolade de la valeur du dinar, * une incompréhension grandissante face aux contradictions du pouvoir. Le choc a été immense quand l’Algérie, qui se proclamait « plus palestinienne que les Palestiniens » et « plus Hamas que le Hamas », a voté **en faveur d’une résolution américaine** qui prévoit le **désarmement du Hamas** et l’installation d’une **force internationale à Gaza**. Le commun des mortels en Algérie n'est pas prêt de comprendre ce changement brutal de posture. Ce vote a profondément dérouté une opinion algérienne habituée à un discours enflammé contre Washington l'impérialiste et Israël la sioniste. Le discours officiel a toujours été inconditionnellement pro-Hamas. Dans cette atmosphère tendue, la sortie d’Ahmed Attaf ressemble fort à un **contre-feu médiatique**, destiné à détourner l’attention du revirement algérien sur le dossier palestinien. Finalement, la proposition d’Attaf n’est pas sérieuse, ni crédible, ni neutre. Elle révèle, en revanche : * une **crise de narration** au sein de la diplomatie algérienne, * un **isolement international** de plus en plus pesant, * une **réalité intérieure fragile** que le pouvoir tente de masquer par des artifices diplomatiques, * et une difficulté persistante à assumer la vérité du conflit : **l’Algérie est, depuis le premier jour, partie prenante**. Plutôt que de jouer au médiateur imaginaire, Alger serait mieux inspirée de répondre à la main tendue du Maroc et d’assumer sa place à la table des négociations, conformément au droit international et à la réalité des faits.